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17.06.2011 / RESSOURCES HUMAINES, CULTURE ET PATRIMOINE VINGT SIXIéME RAPPORT ANNUEL

LA TELEVISION TUNISIENNE

L'extrait de mission
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La télévision Tunisienne a pour mission notamment d’assurer le service public télévisuel, d’enrichir et développer le paysage télévisuel au niveau de la production et de la diffusion, d’enrichir le contenu de la communication télévisuelle, de produire et commercialiser les travaux audio visuels et les spots télévisuels, de vendre les espaces publicitaires et acheter les droits des produits.
 
L’établissement a enregistré un résultat comptable négatif de 11,556 MD en 2008 et de 10,112 MD l’année suivante, et les dettes à sa charge se sont élevées à 25,605 MD à la fin de l’année 2009.
 
La mission de contrôle a concerné principalement la période de 2008 à fin juin 2010 et a permis de formuler des observations portant sur l’organisation et la gestion du patrimoine, l’administration des ressources humaines, la gestion financière et la production et la programmation.  
 
I – L’organisation et la gestion du patrimoine
 
Malgré l’absence d’organigramme spécifique à l’entité, des cadres ont été nommés à des emplois fonctionnels en 2009 et 2010. En il n’a pas été procédé à l’établissement de fiches de poste fixant les attributions de chaque fonction et de chaque structure, ce qui a contribué à l’intervention de plus d’une structure pour la réalisation des mêmes tâches, à la non exécution d’autres tâches et au cumul de tâches incompatibles.
 
L’établissement a pris des mesures d’organisation concernant certains domaines d’activités, mais ces mesures sont restées sans suites. De même, il n’a pas été mis en place de contrat programmes, ni de plan d’orientations stratégiques concernant le système d’information.
 
Il n’a pas été procédé à un inventaire exhaustif du patrimoine de l’ancien Etablissement de la Radio et de la Télévision Tunisienne en vue de son affectation aux deux établissements de la Radio Tunisienne et de la Télévision Tunisienne. De même, la Télévision n’a pas établit l’inventaire annuel de ses biens, ce qui ne favorise pas leur suivi, leur préservation et la planification de leur utilisation compte tenu des besoins des deux chaines de télévision.
 
Malgré l’importance de la préservation du patrimoine audiovisuel en raison de son caractère vital pour l’Institution et son lien avec la mémoire collective, la Télévision tunisienne n’a pas veillé à la mise en place de procédures couvrant les différents aspects de la gestion de ce patrimoine et garantissant sa meilleure utilisation et sa préservation. La gestion de la filmothèque comprenant près de 200.000 enregistrements divers est encore manuelle.
 
Des originaux des enregistrements sont prêtés au lieu des copies, et parfois certains enregistrements ne sont pas récupérés à l’instar de plus de 5.000 opérations de prêt durant la période allant de 1993 à fin avril 2009.
 
La numérisation du patrimoine audiovisuel n’a pas encore commencé malgré l’allocation de crédits d’un montant de 4 MD durant la période du 11ème plan.
 
II – La gestion des ressources humaines
 
Bien que la Télévision ne soit pas dotée d’un nombre suffisant de spécialistes dans les domaines de la production, de la photographie, du montage et de l’habillage informatique, ses besoins n’ont pas été satisfaits en des spécialités nécessaires de façon à lui permettre d’assurer le fonctionnement normal de ses activités. En revanche, l’établissement recourait, pour effectuer ces travaux à un nombre important de collaborateurs externes dont la majorité n’a pas les spécialités requises.
 
La méthode de recrutement adoptée par l’entité de façon répétitive durant des années n’est pas de nature à  permettre la compétition. En effet des concours internes sont organisés pour la régularisation de la situation d’agents auxquels l’institution a eu recours au départ en dehors de tout concours externe.
 
L’entité a servi la rémunération à 3 de ses agents alors qu’ils travaillent en réalité dans des établissements  privés d’information.
 
L’entité a recouru en 2008 aux services d’un expert français en vue de l’organisation de l’activité de l’administration, de la mise à niveau les ressources humaines et du développement de l’activité production en contrepartie de 100 milles Euros, en plus de la prise en charge de  ses frais de transport (25.000 dinars) et d’hébergement (50.000 dinars). Or, les services de cet expert se sont limités au développement de l’un des programmes et l’aménagement des espaces aux services du journal télévisé dans l’ancien siège de la télévision.
 
Il s’est avéré, pour certains agents, l’insuffisance des pré-requis ou l’absence totale de formation préalable leur permettant de suivre les sessions de formation, outre leur absence totale ou partielle à ces sessions. De même, il appert que l’entité n’a pas accordé l’importance nécessaire à la formation dans les métiers, la formation continue et la formation des nouvelles recrues.
 
Absence de contrôle de la présence des agents, ce qui ne permet pas de vérifier s’ils ont assuré le nombre d’heures de travail requis et la véracité du calcul des heures supplémentaires, sachant que les dépenses au titre de l’indemnité d’heures supplémentaires dépassent 506 mille dinars servies en 2009 au profit de 414 agents de la télévision dont 212 ont bénéficié de cette indemnité de façon continue tout au long de l’année.
 
Contrairement au statut particulier des agents de l’établissement, l’octroi de contrats de production à certains agents s’est poursuivi sous forme de ressources quasi-permanente en plus des salaires, sans que les dits contrats soient liés à une créativité ni à des critères préétablis fixant ses montants. Les sommes déboursées à ce titre en 2009 se sont élevées à 2,881 MD dans le cadre de contrats continus (0,547 MD) et de contrats non continus (2,334 MD). Le cumul des contrats de production et des indemnités d’heures supplémentaires a concerné 230 agents dont 29 ont perçu chacun un montant dépassant 10 mille dinars. Ce montant était compris entre 10 et 20 mille dinars pour 23 agents et a dépassé 30 mille dinars dans trois cas.
 
III – la gestion financière  
 
Le budget de fonctionnement de la Télévision s’est élevé à 48,831 MD en 2009, et provient de la subvention de l’Etat (34%), de la contribution des adhérents au réseau d’électricité (42 %) et des ressources propres (24%) provenant principalement des recettes de la publicité et du sponsoring.
 
Les recettes de la publicité et du sponsoring ont régressé de 21,813 MD en 2005 à 11,230 MD en 2009, en raison notamment de l’accaparation des chaines de télévision et de radio privées d’une part importante de la matière publicitaire.
 
les conventions de sponsoring pour certains clients font défaut, et la facturation se fait pour un montant global sur la base des bons de commande du client et sans application du tarif fixé. Ainsi, l’un des clients a bénéficié d’une offre de sponsoring pour la somme de 185 mille dinars alors que le coût réel du spot  concerné est évalué à 436 mille dinars.
 
Le visionnage des spots publicitaires, afin de s’assurer de leur contenu ainsi que de la conformité du temps qui leur est accordé, n’est parfois pas respecté. Des insuffisances ont été enregistrées  et ont concerné la non diffusion des spots demandés par les clients, la diffusion d’anciennes versions des spots ou la diffusion de spots non demandés par les clients, ce qui a engendré plusieurs demandes de révision des commandes et même leur annulation.
 
La Télévision procède à l’échange d’espaces publicitaires au profit de certaines sociétés en contrepartie de production fournie, de réalisations de productions ou la prestation de certains services, et ce, parfois, en l’absence de conventions ou dans le cadre de conventions conclues à titre de régularisation.
 
L’absence de conventions ou leur établissement à titre de régularisation dénote le manque de transparence des procédures suivies dans le choix des travaux et leur exécution et contraste avec les procédures réglementaires et administratives en vigueur.
 
Des espaces publicitaires ont été échangés contre des billets d’avion à fournir par la société «Tunis Air», dans le cadre de 2 conventions signées à titre de régularisation en 2008 et 2009. La Télévision n’a pas procédé au suivi des obligations de la dite société à son égard ce qui a entrainé la non utilisation d’une part importante des billets mis à sa disposition.
 
Les SMS ont généré en 2008 des recettes de 310,553 mille dinars, et aucune recette n’a été enregistrée en 2009 et jusqu’à juin 2010, alors qu’un montant de 560 mille dinars aurait pu être réalisé en 2008 et 52,267 mille dinars en 2009, si la Télévision avait suivi cette activité en utilisant les moyens techniques disponibles à cet effet.
 
Les créances de la Télévision auprès de ses clients et qui ont dépassé les délais de paiement se sont élevées à 1.909,693 mille dinars au 28 avril 2010 et concernent principalement une agence de publicité (236,828 mille dinars) et l’Agence Tunisienne de Communication Extérieure (467,161 mille dinars).
 
IV – La production et la Programmation 
 
La Télévision ne dispose pas d’une stratégie claire de production ni de normes pour l’évaluation du contenu et du coût des programmes qu’elle présente. Son attention reste portée principalement sur les moyens de meubler la grille quotidienne de programmes des 2 chaines et qui reste soumise à l’appréciation personnelle des directeurs de ces 2 chaines. La production dramatique, en particulier, se limite au mois de ramadhan, et les choix se font parfois de façon tardive et improvisée, ne permettant pas de garantir les meilleures formes de production, la maitrise des coûts et la qualité des programmes.
 
L’insuffisance de coordination et de complémentarité entre les 2 chaînes  a généré une ressemblance du contenu des grilles à tel point  qu’il devient difficile aux téléspectateurs de les différencier, d’où la nécessité de définir le rôle de chacune d’elles et de valoriser ses spécificités.
 
L’entité est confrontée à la régression de certaines spécialités à l’instar de la production et la photographie et à la détérioration de l’état de certains équipements mobiles de production. De même, le nouveau local de la Télévision ne procure pas toujours les espaces adéquats à la production, d’où l’utilisation du studio virtuel mis en place pour un coût d’environ 5 MD comme un studio normal. Les équipements de pilotage et de photographie virtuelle qui s’y trouvent et qui ne sont pas adaptés à une utilisation normale, sont devenus une entrave à une bonne exploitation du studio.
 
Le phénomène des contrats de production s’amplifie au niveau de l’établissement de la Télévision, étant donné que le montant servi dans le cadre de ces contrats au profit de ses agents ainsi qu’à des collaborateurs externes a atteint en 2008 et 2009 respectivement 3,758 MD et 6,175 MD, ce qui représente 35,3 %  et 66,3 % du coût global de la production interne.
 
En matière d’habillage informatique des émissions télévisées, la Télévision fait appel aux services de 2 sociétés spécialisées dans ce domaine. La valeur du marché conclu a été augmentée sans la signature d’avenants et sans passer par la commission supérieure des marchés.
 
Le recours à l’exécution de productions par des parties externes à l’entité, selon la formule du producteur exécutif, était considéré comme une procédure exceptionnelle consacrée à la réalisation d’œuvres dramatiques. Or, son champ s’est élargi pour inclure des programmes culturels, de services ou sociaux. Entre 2008 et juin 2010, il a été recensé des travaux exécutés ou en exécution par le recours au producteur exécutif au nombre de 36, dont certains ont été financés par le budget de la Télévision et d’autres acquis en contrepartie d’espaces publicitaires. Le coût total de ces productions s’est élevé à 35,816 MD dont 21,039 MD dans le cadre de l’échange contre des espaces publicitaires.
 
Le recours à la formule de producteur exécutif est entaché d’insuffisances ayant trait au processus de son choix, à l’évaluation du coût de production et au suivi de l’exécution. En effet, le choix de plusieurs travaux s’est fait sur la base de propositions individuelles faites par des parties externes à l’entité, adressées à diverses structures de la Télévision qui procèdent à leur étude et à la prise de décision sans aucune comparaison entre le coût proposé par le producteur exécutif et le coût de sa production à l’interne. L’exécution de ces travaux s’effectue dans le cadre de marché de gré à gré et parfois en dehors du cadre contractuel.
 
Le conseil d’administration n'exerce pas ses attributions en matière d'approbation des projets des travaux en question.
 
Certains travaux ne sont, parfois, pas exécutés en totalité ou en partie, ce qui perturbe la programmation et la planification de la production.
 
La production exécution a concerné plusieurs travaux ne revêtant pas l’aspect de grandes productions, et qui, en raison de leur contenu et de leur coût élevé, auraient pus être produits par les moyens propres de la Télévision, qui fournit, parfois gratuitement, la plus grande partie de la matière audiovisuelle à la société de production.
 
L’entité a procédé, par le biais d’une société privée de production à l’exécution d’émissions de variétés soit suivant la formule de l’échange contre des espaces publicitaires soit au moyen de l’achat au comptant pour un coût global de 28,570 MD. La même société privée a produit au profit de la Télévision des œuvres dramatiques, suivant la formule de l’échange contre des espaces publicitaires, en l’absence de conventions et pour un coût estimé, sur la base de conventions similaires à 12 MD. Il importe de signaler que la Télévision a mobilisé une partie de ses moyens techniques et de ses ressources humaines pour l’exécution de ces travaux. 
 
L’entité est dépourvue de normes claires et de comptabilité analytique lui permettant d’évaluer le coût de production.
 
La moyenne des crédits réservés à l’acquisition des droits de transmission des programmes acquis sur le marché local ou étranger s’est élevée à 6,187 MD pendant la période 2008-2010. Cette formule n’a pas été exempte d’insuffisances entachant le choix des acquisitions, l’établissement des contrats les concernant et le règlement des montants dus par la Télévision à ce titre.
 
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